El Naranjo de Bulnes (2519m)
Avant de prendre un petit déjeuner copieux à la pension, je vais faire un dernier tour et faire quelques photos. Après m’être restauré, je pars à travers la montagne. Il fait froid et le ciel se prépare encore à déverser des quantité de pluie. Je fais le tour par le côté Ouest du massif pour me rendre à Arenas de Cabrales pour photographier un pic. Encore une fois, c’est à partir d’une photo vue sur internet en faisant mes recherches, que j'ai choisi ma destination. Dommage que la lumière ne soit pas avec moi parce que les points de vue sur la route auraient mérité un arrêt, mais sans lumière pour mettre en valeur ces paysages accidentés, c’est peine perdue. J’ai filmé en partie mon trajet, histoire de vous donner une idée des routes que j’ai dû emprunter ce jour-là, et encore, elles étaient en bien meilleur état que celles pour me rendre à Caín .
2h30 de routes sinueuses pour parcourir les 100km qui me séparaient de Arenas et du fameux El Naranjo de Bulnes. Je dois avouer que j’étais un peu déçu en arrivant sur ce parking qui, à ce qu’il semble, est un des meilleurs points de vue sur ce pic. N’étant pas attendu dans mon nouveau logement avant plusieurs heures, je pensais pouvoir passer celles-ci tranquillement après cette route éprouvante. Le temps était gris comme vous avez pu le constater dans la vidéo, et le parking commençait à se remplir de touristes, principalement des espagnols. J’ai bien sûr sorti l’appareil photo, histoire de tester quelques cadrages, mais il faut reconnaître qu’il n’y a pas vraiment d’option à part cette composition :
J’ai donc passé 2 ou 3h sur ce parking à observer le pic jouer à cache-cache dans les nuages et fait quelques rencontres sympathiques. J’ai notamment fait la rencontre d’un photographe portugais qui voyageait dans son utilitaire aménagé. J’ai passé près d’une heure à discuter avec Joao qui faisait un road trip dans le Nord de l’Espagne. Il est spécialisé dans le portrait de studio mais pas seulement. Il fait également de l’illustration lifestyle, de la photo publicitaire, et je dois dire qu’il est vraiment bon dans ces domaines! Bref, après ces heures passées sur ce parking, il est temps de rejoindre mon logement situé à quelques minutes.
Et là, impossible de se garer devant à l’adresse indiquée. Ca va être sympa de traîner toutes mes affaires jusque-là! Finalement, je trouve un grand parking public à une cinquantaine de mètres. Je me rapproche de la pensión dont une partie n’a plus de toiture et est ouverte à tous les vents, mais il y a tout de même une porte sur laquelle est inscrit : “Hay duchas”, il y a des douches! J’espère bien qu’il y a des douches! La façade de la partie où il y a encore un toit est peinte en bleu, il y a des balcons avec des tables et des chaises, j’en déduis que je vais loger dans cette partie, enfin je l’espère. Je m’approche un peu plus, il y a des chaises et des bancs taillés dans des troncs d’arbres. Je commence à percevoir le côté rustique du lieu. Je frappe à la porte et la partie supérieure de celle-ci s’ouvre, laissant apparaitre une dame d’un certain âge portant blouse à fleurs et calvitie. L’accueil est un peu sec. Elle s’appelle Jely ou Gely (je ne l’ai jamais vu écrit mais ça se prononce avec la jota espagnole). Elle me fait faire le tour des lieux et je dois dire que ce n’est pas banal : la cuisine se trouve à l’extérieur et, quand je dis à l’extérieur, c’est que c’est dans une cour mais il n’y a pas de murs, ni de porte à proprement parler, et vous êtes directement sous le toit donc pas de plafond…mais des tuiles. Elle me dit : “Lo que usas, lo limpias!” et je me dis que je vais même laver avant d’utiliser quoi que ce soit dans cette cuisine. Espérons que la chambre soit mieux que la cuisine.
La chambre est passable mais elle m’explique que je ne dois pas trop défaire mes affaires parce que demain je déménage dans une plus grande chambre. Elle estime que c’est à moi que celle-ci doit revenir mais pour le moment, elle est encore occupée.
Je transfère mes affaires depuis ma voiture et entreprend de m’installer un peu et de me faire un petit casse-croûte à la cuisine. Je réalise alors que la cour dans laquelle se trouve la cuisine est attenante à un poulailler… pas top pour l’hygiène tout ça mais bon, je ne vais pas remettre en question tous mes plans pour ça.
Le temps semble se dégager un peu et comme je ne suis qu’à 5mn du parking avec vue sur El Naranjo, je vais aller y faire un tour avec mon boitier.
J’arrive donc sur place vers 20h15, j’ai une bonne heure devant moi avant que la nuit ne tombe mais je dois dire que ce n’est pas vraiment ce à quoi je m’attendais:
Le pic n’est absolument pas éclairé, et est enveloppé de nuages sombres. Ca va être une histoire de patience sans garantie de photos qui tiennent la route. Mais bon, je suis là pour ça et j’ai la semaine pour obtenir une photo qui me plaise. Cela me permet d’essayer d’autres compositions mais rien qui mérite d’être montré. La longue attente commence. Une vingtaine de minutes plus tard, les choses commencent à changer.
Je ne suis plus tout seul sur mon parking. Une voiture s’est garée et un couple s’est installé à une dizaine de mètres sur ma gauche avec trépieds et appareils photos. Je n’y prête pas vraiment attention parce qu’il y a pas mal d’aller-et-venues. Les gens s’arrêtent, font une photo avec leur portable, un selfie et repartent au bout de dix minutes en général. Mais ces deux-là ont l’air de prendre au sérieux la photographie. Je continue d’observer les variations de lumières et le mouvement des nuages autour du pic. Une autre vingtaine de minutes plus tard, les couleurs ont subtilement changé mais la lumière chute drastiquement. Le soleil est en train de passer derrière les montagnes, l’heure dorée touche à sa fin.
Je regarde à ma gauche et le couple est toujours là. En les regardant, je ressens comme une impression de familiarité. Je me retourne vers le parking. La voiture aussi m’est familière. Non! Ce serait incroyable que cela soit celle qui était garée devant la mienne lorsque j’étais sur la côte à photographier ces incroyables formations rocheuses dans les Asturies! Le jour où j’avais égaré un gant! Impossible que ce soit les gens qui me l’avaient gentiment déposé en évidence sur un piquet.
Je m’avance vers eux en les saluant en espagnol et je bascule rapidement sur l’anglais car, bien que dans ma troisième semaine en Espagne, parler dans la langue de Cervantes reste toujours un énorme challenge pour moi. Certes, ma compréhension s’est grandement améliorée mais converser reste une épreuve. Il se trouve qu’ils parlent très bien anglais l’un comme l’autre. Je leur demande donc si par le plus grand des hasards ils ne seraient pas les personnes que j’avais vu ce matin-là près d’Oviñana. Bingo! Bien évidemment, je les remercie pour le gant.
Tous deux doivent avoir la trentaine et viennent de Galice. Ils font un photo trip dans le nord mais celui-ci arrive à son terme. Ils viennent de passer plusieurs jours ici dans l’espoir de photographier le pic mais la météo a joué contre eux. Ce soir, c’est leur dernière chance. J’espère être plus chanceux. On échange nos instagrams. A la base, c’est lui le passionné de photo mais sa compagne m’explique qu’à force de le suivre et de s’ennuyer à le regarder faire des photos, elle lui a demandé de lui payer un boitier sinon elle ne l’accompagnerait plus. Ils sont vraiment très sympas mais je ne veux pas gâcher leur dernière chance de faire une photo décente avant de rentrer. Donc je retourne à mes photos en les remerciant encore pour mon gant. Il m’aurait vraiment fait défaut il y a quelques jours, lorsque je me promenais sur la Ruta del Cares.
Je fais quelques photos des montagnes autour du Picu Urrelliu (El Naranjo de Bulnes en Asturien) dont celle-ci de la Cabeza Redonda (1247m) qui a bien voulu sortir des nuages au moment où un rayon de soleil l’éclairait.
Et je fais un panoramique avec 2 photos avec le Cuetus del Albu (2445m) à droite de l’image. Ca m’évite de changer d’optique.
Le soleil se couche et il est bientôt temps de rentrer. Je persiste un peu car parfois il y a un retour des couleurs. Il suffit qu’un banc de nuages se dissipe devant le soleil. Mais ce n’est pas vraiment ce qui se passe. Les nuages enveloppe à nouveau le pic.
La météo annonce de la pluie pour le lendemain après-midi. La première journée sera donc plus reposante. C’est plutôt bienvenu après le trajet du jour qui était, il faut bien le dire, un peu éprouvant. Surtout la première partie qui demandait plus de vigilance. En plus demain, je déménage en début d’après-midi quand Gely aura fini de préparer ma nouvelle chambre.